"Il n'y a aucun remède contre la naissance et la mort, sinon de profiter de la période qui les sépare."

   Chaque être qui vient au monde n'est pas forcément attendu par ses parents, et dans les rues boueuses de Londres, un enfant n'est jamais vraiment le bienvenue dans une famille déjà nombreuse. La petite Mary n'échappa pas à la règle.

   Elle naquit dans d'affreuses souffrances dans une famille qui contait déjà cinq enfants. Elle fut une bouche de plus à nourrir pour un père charpentier et une mère qui ne travaillait pas. Dès son plus jeune âge, sa mère l'envoya, avec ses frères et sœurs, mendier dans les rues de Londres ainsi que sur les places des marchés où venait nombreux les nobles et leur argent. Ils ne récoltaient pas beaucoup, mais la bouille attendrissante de la cadette permettait de nourrir convenablement toute la famille. Elle n'eut pas le droit aux privilèges de l’aîné, elle, faible femelle qui étant la dernière, dût se contenter des restes pendant de nombreuses années. Pourtant elle ne fut pas malheureuse, loin de là ! La jeune Mary vécue sa tendre enfance au milieu de parents aimants et généreux qui malgré leur pauvreté, ne refusaient rien à leurs enfants pourtant nombreux. De plus, elle grandit au milieu de tous ses frères et sœurs avec lesquels elle s'entendait parfaitement et avec qui elle prenait plaisir, si on pouvait dire, à parcourir les rues de Londres la main tendue au dessus des pavés humides, attendant une âme charitable. Mendier n'était pas un plaisir, mais c'était un moyen nécessaire pour pouvoir au moins se nourrir et avoir un toit au dessus de sa tête, lorsqu'on était aussi pauvre. De ce fait, elle n'eût pas non plus d'éducation particulière, mais elle aimait vivre, courir partout en riant et profiter simplement de la vie qu'elle avait et qui sans artifices lui offrait le bonheur dont elle avait besoin.

"Le vrai bonheur est de mettre son bonheur dans le bonheur d'un autre."

   Quinze années étaient passées depuis son heureuse naissance lorsque, Mary, d'une beauté déjà rayonnante, fut prise un jour d'une inspiration soudaine et commença à danser dans les rues. La jeune fille à l'allure gracieuse avait toujours eu un penchant pour la danse, mais lors de cette année, elle osa . Elle s'amusait à danser autour des gens dans la rue en leur communiquant par la même occasion, son bonheur et sa joie de vivre. Au début par plaisir et pour s'amuser, la famille Parker découvrit bien vite que lorsque Mary dansait, les pièces se faisaient plus nombreuses dans les poches de la maisonnée. Alors la jeune fille dansa encore plus, toujours par bonheur, elle en faisait aussi profiter les êtres qu'elle aimait et cela la rendait plus heureuse encore.

   Tournoyant du matin jusqu'au soir sur les pavés de Londres, souvent pieds nus, son talent pour la danse se précisa alors très vite et des nobles allaient jusqu'à traverser la ville entière pour voir cette beauté envoutante leur offrir son spectacle d'insouciance. Car lorsqu'elle dansait, Mary ne pensait à rien. Bercée par ses pas, elle tournait en rond les yeux fermés et oubliait alors tout ce qui l'entourait, juste pour danser. C'est lors de cette même année qu'elle fut touchée par son ange gardien, Hugh Fitzpatrik, un bourgeois à la recherche de jeunes prodiges. Ce dernier, ayant immédiatement repéré la jeune fille, l'a pris sous son aile et lui proposa de l'instruire. La jeune Mary s'empressa de dire oui et quelques jours plus tard, elle était en route vers Bath, la demeure de son bienfaiteur. Changeant totalement de vie, elle put dès lors s'habiller comme une véritable bourgeoise, ayant la robe et l'éducation. Avec sa beauté, son intelligence et surtout son talent, le doux petit cygne, comme aimait l'appeler son protecteur, monta très vite dans la société. Apprenant à bien se comporter au milieu de personnes de hauts rangs, elle apprit aussi à lire, à chanter, à jouer du piano, et tout ce qu'une jeune femme de bonne naissance se devait de connaître. Pourtant cette bonne naissance, elle ne l'avait pas. Née de parents pauvres, elle se sentait souvent décalée par rapport aux autres. Mais surtout, elle se sentait différente de son mentor qui lui aidait à gravir les échelons.

   Alors que les semaines passèrent, Mary commença peu à peu à aimer l'homme. Elle aimait sa gentillesse, la bonté dont il faisait preuve à son égard et tout ce qui faisait de lui un être charmant, si différent des nobles qui engageaient la jeune femme pour animer leurs soirées. C'était un sentiment tellement nouveau pour elle, qu'elle ne pensa pas à l'enterrer et laissa cet amour se développer en elle. Cependant, après deux ans passé chez lui, à suivre son apprentissage, une idée s'imposa dans son esprit : c'était un amour à sens unique. Et comprenant alors que rien ne serait jamais comme dans les romans qu'elle dévorait, elle décida après plusieurs mois de réflexion, d'accepter les propositions des autres nobles et de déménager de nouveaux à Londres, loin de lui. Dans la réalité, une mendiante et un bourgeois ne finissent jamais ensemble...

"Aucune grâce extérieure n'est complète si la beauté intérieure ne la vivifie."

   De retour à Londres après deux ans passés à Bath, Mary, alors âgée de dix-sept ans, fut engagé par un bon nombre de haut noble. Plusieurs fois même, le roi pu l'admirer aux soirées qu'ils donnaient pour la cour. Cependant, toutes ces richesses et cette hypocrisie firent fuirent la jeune femme qui, préférant ne pas se laisser manipuler par cette société frivole, décida de quitter la cour pour retourner à une vie simple. Depuis ce jour, elle vit un peu à l'écart du centre de Londres, et anime de grandes soirées données par des gens moins riches qu'auparavant, grâce à sa beauté et sa grâce naturelle. Elle vit de sa passion et son métier lui permet même de loger dans une belle petite maison fort spacieuse et de se vêtir comme une petite bourgeoise. Elle reste tout de même très attachée à son milieu d'origine et rend souvent visite à sa grande famille pour leur glisser quelques dizaines de pièces dans les poches. Mais aussi pour voir ses frères et sœurs qui ont été rejoint par Anna, une orpheline de seulement dix ans, adoptée par la famille et qui a la même passion que la jeune femme : la danse.

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